À première vue, le cas de Pedro Ordóñez de Ceballos (c. 1556-1636) semble simple : en 1614, cet Espagnol qui se dit originaire de Jaén publie à Madrid un livre intitulé Viaje del mundo, où il relate ses aventures à travers le monde sur plus de trente ans, d'abord comme laïc, puis comme prêtre. Son récit a rapidement été mis en doute et les débats qui ont suivi jusqu'à nos jours se sont longtemps concentrés sur la véracité de ses propos plutôt que sur leur valeur historique. Pourtant, la fabrique du héros à laquelle procède Ceballos offre une perspective précieuse sur la présence ibérique en Amérique et en Asie à la charnière entre les XVIe et XVIIe siècles. Son œœuvre, qui révèle une profonde compréhension des enjeux sociaux, religieux et économiques des régions qu'il traverse, invite à réfléchir aux dynamiques de pouvoir et à la fragilité de la présence coloniale dans ces territoires. Le parcours de Ceballos, qui fait jouer les échelles à travers une carrière présentée comme planétaire, son implication dans des événements qui ont marqué des contextes régionaux et son attachement indéfectible pour Jaén, se prêtent à une histoire globale et connectée. La figure de Ceballos illustre l'importance du retour en Espagne des acteurs de la mondialisation, car c'est depuis son pays natal qu'il déploie une constellation d'œuvres relatives à son périple. À travers l'étude des différents procédés qu'il met en place pour promouvoir sa carrière, cette thèse explore la façon dont Ceballos, observatoire mobile de la monarchie catholique, éclaire les modèles, les imaginaires et les aspirations de ses contemporains à l'époque de la mondialisation ibérique.